Dans le cadre d’une étude financée par la DRAAF AuRA, 59 agriculteurs biologiques de la région ont répondu à une enquête en ligne menée par la FRAB AuRA en juin 2022 concernant leurs motivations à convertir leur exploitation vers l’AB.

Ils ont été sélectionnés selon différents critères : la production principale de leur exploitation (fruits, grandes cultures, ovins viande, truies, vaches allaitantes ou vaches laitières), un passage en AB via une conversion (les installations directement en bio n’étaient pas sélectionnées), et une première année de conversion comprise entre 2014 et 2020. De plus, des entretiens en présentiel ont été conduits avec 10 agriculteurs conventionnels et 9 conseillers en agriculture biologique (GAB et Chambres d’agriculture, en visioconférence). Les résultats sont compilés ici.

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Les agriculteurs bio ont noté chaque motivation comme ayant été « très importante » ou au contraire « pas importante » au moment de la conversion de leur exploitation vers l’AB (5 réponses possibles sur l’échelle).

La santé, une motivation principale à convertir l’exploitation

Sur 59 agriculteurs biologiques enquêtés, la majorité considère la santé comme étant une motivation très importante dans leur décision d’un passage à l’AB. Cette tendance est observée par les conseillers techniques : « la santé humaine vis-à-vis des produits phyto c’est une motivation, ils en ont marre d’utiliser ces produits et de les manipuler » (Conseiller).

Une pression sociétale et une sensibilité à la protection de l’environnement

Cependant, les agriculteurs conventionnels enquêtés n’abordent pas spontanément l’aspect de la santé dans ce qui les motive à s’intéresser à l’AB. Cette conscience éthique n’est pas directement liée à leur inquiétude pour leur santé et/ou celle de leurs proches, mais davantage à l’image que l’utilisation des produits phytosanitaires renvoie : « Moi j’aime pas faire du phyto. Il y a une pression énorme autour de ça. Beaucoup de jugement, c’est dur quand même » (Agriculteur).

Cette pression sociétale est en effet présente dans la réflexion des agriculteurs à changer leurs pratiques, selon les conseillers d’Auvergne-Rhône-Alpes : « Ils ont des personnes autour d’eux qui leur demandent « pourquoi tu passes pas en bio ? » et du coup ils se posent la question » (Conseiller).

La motivation « idéologique » est la deuxième plus importante dans la décision de la conversion pour les agriculteurs bio. La question ne vient donc pas uniquement de la pression sociale que les agriculteurs subissent, mais également d’une sensibilité personnelle au respect de l’environnement : « j’ai la conscience qu’il faut être attentif à la biodiversité et je le fais déjà, j’ai cette sensibilité » (Agriculteur) « J’en pense du bien de l’AB. Pour moi on ne crée rien, on ne fait que redécouvrir. C’est ce que nos grands-parents faisaient » (Agriculteur).

L’économie : une motivation qui déclenche la conversion

« Pour moi, il n’y a plus de convaincus, c’est le prix qui motive maintenant » (agriculteur).

Cet agriculteur conventionnel pense que c’est l’aspect économique qui prend le dessus dans la décision d’une conversion à l’AB. Cependant, seulement 2 agriculteurs conventionnels enquêtés ont abordé l’économie comme une motivation. Malgré cela, 39 % des agriculteurs bio enquêtés ont considéré l’aspect économique comme étant une motivation très importante lors de la conversion de leur exploitation à l’AB. Pour les conseillers techniques, la motivation économique initie la démarche de conversion, et d’autres motivations se greffent au projet par la suite : « Très clairement, il y a des motivations économiques. On entend dire que ce ne sont pas de bonnes motivations mais ce n’est pas vrai, toute motivation est bonne. Au cours de sa démarche l’agriculteur trouvera d’autres motivations » (Conseiller). « L’argument économique c’est souvent le premier, mais après il y a un gros engouement technique : se poser plus de questions, réfléchir à son système, etc.» (Conseiller).

La conversion à l’AB : retour d’expérience des agriculteurs bio d’Auvergne-Rhône-Alpes

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Selon la littérature scientifique, le temps de réflexion d’un agriculteur avant de commencer une démarche de conversion vers l’AB est entre 3 et 4 ans. Parmi les 59 agriculteurs enquêtés, la majorité a réfléchi pendant 2 ans ou moins avant de commencer une conversion vers l’AB. Cependant, certains agriculteurs ont besoin de davantage de temps avant de se lancer dans un projet tel que le passage au bio, pouvant aller jusqu’à 22 ans de réflexion pour l’un des agriculteurs enquêtés.

Il est également relevé par les chercheurs que les agriculteurs bio ont tendance à plus échanger entre eux, et à se réunir en groupements agricoles. Cependant, 27 enquêtés disent ne pas faire partie de groupement d’agriculteurs, et 21 indiquent avoir fait partie d’un groupement avant leur passage à l’AB. Seulement 5 agriculteurs ont rejoint des groupes suite à la conversion de leur exploitation. Ces groupements ont pour objectif principal un partage de matériel, puis de connaissances et enfin de commercialisation.

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Globalement, les agriculteurs bio sont peu (voire très peu) satisfaits économi- quement suite à leur conversion. Cela peut s’expliquer par une moyenne des années de conversion des enquêtés à 2018, et une conjoncture probablement défavorable. Il est important de travailler à leurs côtés pour améliorer,la situation. Cependant, les exploitants se disent sa- tisfaits techniquement, et très satisfaits personnellement suite à ce passage à l’AB.

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Auteur : Cécile Petrot, FRAB Auvergne-Rhône-Alpes

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Article issu du magazine La Luciole, le bulletin trimestriel des pratiques bio à destination des agriculteurs bio régionaux impliqués dans l'agriculture biologique. Article rédigé par la Frab.