Interview de Nicolas Humbert, Papilles Sauvages
Pouvez-vous présenter “Papilles Sauvages” et ses produits ?
Depuis 2018, Papilles Sauvages fabrique des confitures bio à Crest dans la Biovallée. Alors qu’initialement la vente ne se faisait que sur les marchés, aujourd’hui nous vendons majoritairement auprès des épiceries de la Drôme et de l’Ardèche. Nos produits se retrouvent également dans l’épicerie d’Anne-Sophie Pic, cheffe étoilée.
Nous produisons des confitures de myrtilles sauvages, framboises, fraises, abricots et figues, mais également une Douceur de coing, une Crème de chataîgne ainsi que des produits salés tels que le Ketchup cynorhodon, le pesto ail des ours et le confit d’oignon.
Nos produits sont très qualitatifs car nous essayons de trouver les meilleurs fruits, et nous ajoutons un minimum de sucre.
Nous achetons à de nombreux producteurs locaux différents pour lesquels nous acceptons de payer le prix juste de leurs productions, ce qui explique un prix plus cher de nos produits. Nous sommes fiers de nos produits car toute la valeur va pour la fabrication du produit et les producteurs.
Pour expliquer la démarche, nous essayons d’avoir un contact direct avec les clients : il y a mon mail derrière chaque produit, et je réponds à tout le monde !
Nous sommes aussi sur le marché de Crest tous les samedi matin.
Comment arrivez-vous à vous approvisionner localement en fruits bio ?
Nous avons la particularité de faire de la cueillette sauvage, mais pour la majorité des fruits nous nous approvisionnons en direct auprès de petits producteurs de la Drôme et l’Ardèche (sauf une partie de la figue qui vient du sud de la France). On adapte nos recettes en fonction des fruits : chaque lot est différent, en fonction des variétés par exemple, mais on arrive toujours à homogénéiser les résultats afin d’avoir la même texture et une qualité excellente.
Comment relocaliser la filière petits fruits bio en France ?
Il faut que les consommateurs se posent la question de ce qu’ils achètent : consommer c’est un acte politique.
Si les gens achètent nos produits, on va avoir besoin de fruits et on va développer la filière localement.
C’est pour cela qu’on communique beaucoup à nos clients sur les produits afin qu’ils soient conscients de ce qu’ils achètent. Il n’y a pas de myrtille d’Europe de l’est dans nos produits ! Les épiceries sont aussi porteuses de ce message. On constate d’ailleurs que plus on a de lien direct avec le distributeur ou le consommateur, plus les ventes sont importantes.
Comment réagissez-vous face aux enjeux économiques et climatiques actuels ?
De notre côté, avec le contexte économique, les ventes plafonnent ou diminuent légèrement, mais pas tant que ça. Quand on crée un réseau, en direct avec des personnes, on peut plus facilement réagir et comprendre ce qui se passe. On a un rapport d’entraide et de solidarité qui n’existe pas forcément dans les systèmes avec des intermédiaires qui reposent sur une logique économique.
La difficulté est de changer le système. Avec le réchauffement climatique, on parle d’une question de survie ! Les producteurs avec qui on travaille en direct se rendent compte des évolutions d’années en année sur leurs productions. Les gens sont parfois isolés en ville et se sentent éloignés de tout ça, mais quand on a les pieds sur terre on se rend compte des changements et ça fait peur.
A notre petite échelle, et avec parfois nos contradictions, nous essayons de participer à un modèle plus résilient.
Nous livrons par exemple des produits à Paris en bateau puis en vélo cargo depuis le Pouzin. Nous essayons aussi de mettre en place la consigne de nos pots en verre dans certains points de vente.